Vous aimez les langues ? Vous aimez jouer avec les mots, rigoler, refaire le monde ? Délires de linguiste est fait pour vous ! Bienvenus sur le blog de Jean O'Creisren !
Vous aussi, vous êtes fan deSka-P ? Voici ma traduction en français des paroles de « Niño Soldado » (¡¡Que corra la voz!! – 2002)
L’Enfant soldat
Je suis allé naître là où il n’y a rien Derrière cette ligne qui sépare le bien du mal. Ma terre se nomme « misère » Et je ne connais pas le mot « liberté ».
J’ai été séquestré lors d’une guerre, Torturé et préparé à tuer. On m’a transformé en une bête ; Je suis seulement un enfant privé d’identité. On m’a obligé à tirer ; On m’a montré comment assassiner. On m’a obligé à mutiler Dans un véritable enfer sur Terre.
Eh non, ton indifférence ne mérite aucun pardon ! Qui a volé ton cœur ? Tu ne bouges pas de ton fauteuil. Eh non, ton indifférence ne mérite aucun pardon ! Qui a volé ton cœur ? Éteins la télévision !
En me braquant un pistolet sur le tête, Il m’oblige à assassiner mon papa. Je suis une machine de guerre ; Mon doigt appuie sur cette gâchette sans que je ne regarde. On m’a obligé à tirer ; On m’a montré comment assassiner. On m’a obligé à mutiler Dans un véritable enfer sur Terre.
Eh non, ton indifférence ne mérite aucun pardon ! Qui a volé ton cœur ? Tu ne bouges pas de ton fauteuil. Eh non, ton indifférence ne mérite aucun pardon ! Qui a volé ton cœur ? Éteins la télévision !
On m’a obligé à tirer ; On m’a montré comment assassiner. On m’a obligé à mutiler Dans un véritable enfer sur Terre.
Eh non, ton indifférence ne mérite aucun pardon ! Qui a volé ton cœur ? Tu ne bouges pas de ton fauteuil. Eh non, ton indifférence ne mérite aucun pardon ! Qui a volé ton cœur ? Éteins la télévision !
Il y a quelques mois, nous avons élu notre président et nos députés. Si les questions bioéthiques ont été assez absentes des débats, LREM comme la NUPES planifient de légaliser l’euthanasie et le suicide assisté. Une grande consultation citoyenne à ce sujet est prévue dans les mois qui viennent. Comment gérer la fin de vie ? Faut-il ouvrir aux Français·es le droit à mourir dans la dignité ? Est-ce une bonne ou une mauvaise idée ?
Parmi les arguments en faveur d’une telle loi, on avance souvent la liberté et la compassion pour les personnes qui souffrent. Un autre argument de poids est l’écologie. Plus nous sommes nombreux sur Terre, plus nous polluons. Les morts, eux, ne polluent pas. Ce dernier argument me paraît être le seul recevable en faveur de l’euthanasie et du suicide assisté. Néanmoins, la démographie s’effondre dans de nombreux pays, notamment les plus développés. Il paraît donc que, depuis peu, les experts considèrent que la surpopulation ne représente plus une menace pour note environnement. En revanche, la pyramide des âges s’inverse notre population est vieillissante. D’où la question des retraites qui, dans les faits, préoccupe bien plus les Français que l’euthanasie, mais cela est un autre débat.
D’après moi, toute souffrance peut être traitée. Il suffit de développer les soins palliatifs et d’entourer les personnes seules et/ou souffrant de dépression. Octroyer le prétendu « droit de mourir » à une personne qui le réclame est une attitude démissionnaire : « ta vie ne mérite plus d’être vécue, tu n’es plus qu’un déchet et je ne veux surtout pas m’emmerder à prendre soin de toi ». Il ne s’agit pas de juger celles et ceux qui souffrent et formulent cette demande. Cette dernière est généralement un cri de détresse, un appel au secours. Il faut entendre ce cri et y répondre avec courage : « Non, ta vie a de la valeur et mérite d’être vécue ! Bats-toi et je suis à tes côtés pour t’aider ! »
Dans cet article, je raconte l’histoire d’une personne qui a traversé une dépression sévère et qui était sur le point de se suicider. Finalement, elle a accepté de se faire soigner et, après quelques années de lutte, elle ne regrette pas d’avoir choisi la vie. 😊
Comme elle pourrait en témoigner, quelqu’un qui considère la mort comme seule issue n’est pas vraiment libre. La liberté implique la possibilité de choisir au moins entre deux options. Si vous souffrez tellement que mettre fin à vos jours vous semble être la seule voie envisageable, alors vous êtes aussi libre qu’un condamné un mort. Or les partisans de l’euthanasie et du suicide assisté invoquent la liberté pour justifier leur point de vue. Vous voyez bien que cela ne tient pas la route !
Si vous vous sentez au bout du rouleau et ne voyez d’autre issue que l’euthanasie ou le suicide assisté, cet article vous donnera des pistes concrètes pour vous battre et vous en sortir. 😊
Vous pouvez aussi regarder les vidéos suivantes, notamment des témoignages de personnes souffrant de handicaps sévères. Bien que la société leur dise que leur vie n’a aucune valeur, elles s’opposent à l’euthanasie ainsi qu’au suicide assisté. Parmi ces témoins, vous pourrez écouter Philippe Pozzo di Borgo. C’est de son histoire que s’inspire le film Intouchables.
Pour conclure ce raisonnement, je citerai le serment d’Hippocrate. Dans les pays où l’euthanasie et le suicide assisté sont pratiqués, ce sont généralement les médecins qui administrent les produits létaux. Or ces soignants ont promis, au début de leur carrière, de ne jamais provoquer la mort délibérément :
“Au moment d’être admis(e) à exercer la médecine, je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur et de la probité.
Mon premier souci sera de rétablir, de préserver ou de promouvoir la santé dans tous ses éléments, physiques et mentaux, individuels et sociaux.
Je respecterai toutes les personnes, leur autonomie et leur volonté, sans aucune discrimination selon leur état ou leurs convictions. J’interviendrai pour les protéger si elles sont affaiblies, vulnérables ou menacées dans leur intégrité ou leur dignité. Même sous la contrainte, je ne ferai pas usage de mes connaissances contre les lois de l’humanité.
J’informerai les patients des décisions envisagées, de leurs raisons et de leurs conséquences.
Je ne tromperai jamais leur confiance et n’exploiterai pas le pouvoir hérité des circonstances pour forcer les consciences.
Je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera. Je ne me laisserai pas influencer par la soif du gain ou la recherche de la gloire.
Admis(e) dans l’intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés. Reçu(e) à l’intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers et ma conduite ne servira pas à corrompre les moeurs.
Je ferai tout pour soulager les souffrances. Je ne prolongerai pas abusivement les agonies. Je ne provoquerai jamais la mort délibérément.
Je préserverai l’indépendance nécessaire à l’accomplissement de ma mission. Je n’entreprendrai rien qui dépasse mes compétences. Je les entretiendrai et les perfectionnerai pour assurer au mieux les services qui me seront demandés.
J’apporterai mon aide à mes confrères ainsi qu’à leurs familles dans l’adversité.
Que les hommes et mes confrères m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses ; que je sois déshonoré(e) et méprisé(e) si j’y manque.”
En définitive, la fin de vie reste un sujet complexe. Je vous ai exposé mon point de vue sur l’euthanasie et le suicide assisté. Si vous souhaitez vous engager contre cette dérive mortifère, je vous invite à signer cette pétition. Bien évidemment, je ne suis pas spécialiste et tout le monde a le droit de penser différemment. Si vous souhaitez partager votre opinion à ce sujet, n’hésitez pas à laisser un commentaire et je serai ravi de débattre avec vous ! 😊
Où trouver Jésus ? Ce poème de Gabriela Mistral nous donne une image incarnée et vivante de notre Sauveur…
« Que voulez-vous que je représente ? » Demanda le sculpteur religieux.
« Nous disposons de saints en pin ; il y a des statues de plâtre. Regardez ce Christ gisant en bois de cèdre véritable. Cela dépend qui la commande : une famille ou une église ; ou si le but est seulement de la mettre dans un musée. »
« Laissez-moi donc vous expliquer ce que je souhaite en vérité.
Moi, j’ai besoin d’une statue de Jésus, le Galiléen, qui représente son échec devant l’essai d’un monde nouveau, qui sache émouvoir les consciences et changer les mentalités. Je ne veux pas la voir recluse dans une église ou un couvent.
Ni dans un foyer familial pour qu’elle préside les prières. Je ne veux pas qu’elle soit portée en procession par des fidèles. Je désire une image vive d’un Jésus “fils d’homme” en souffrance, illuminant cœur et esprit de tout humain qui la contemple.
Donnez envie de l’affranchir de sa croix et de son tourment ; que celui qui voit cette image n’y contemple pas qu’un défunt, ni, qu’à travers des yeux d’artiste, il admire un vulgaire objet pour s’exclamer, émerveillé : “Quel magnifique torturé !” »
« Pardonnez-moi si je vous dis, répond le sculpteur religieux, qu’ici, vous ne trouverez pas l’image du Nazaréen.
Allez la chercher dans la rue parmi les gens sans logement, dans les hospices et hôpitaux, où sont rassemblés les mourants. À l’intérieur des centres d’accueil où l’on abandonne les anciens, parmi les marginalisés, parmi les enfants affamés, parmi les femmes maltraitées, chez les personnes sans emploi.
Mais ne cherchez pas cette image de Jésus Christ dans les musées, ne cherchez pas dans les statues, dans les autels et les églises.
Ne suivez pas en procession le parcours du Nazaréen. Ne cherchez pas d’image en bois, en bronze, en pierre ou même en plâtre, mieux vaut chercher parmi les pauvres son visage en chair et en os ! »
Gabriela Mistral
Titre d’origine : “Busco la imagen de Cristo”, co-traduit de l’espagnol par Jean O’Creisren.
La pandémie de Covid-19 a fait subir à l’économie mondiale le plus gros choc enregistré à l’époque contemporaine. Le travail de reconstruction à mener dans le sillage de ce désastre prendra des proportions épiques. Or, ce chantier massif arrive à un moment où les analystes, les économistes et les activistes sur toute la surface du globe exhortaient déjà à un changement fondamental de la configuration de nos systèmes économiques pour gérer la crise mondiale causée par le réchauffement climatique.
Presque tout le monde reconnaît que nous devons avant tout décarboner nos économies et mettre un terme à notre utilisation de combustibles fossiles au XXIe siècle. Cela nous permettra d’éviter la fuite en avant ainsi qu’un réchauffement planétaire catastrophique. C’est là ce dont ont convenu les dirigeants qui représentaient presque tous les États-nations du monde en signant l’Accord de Paris sur le climat en 2015.
À quoi ressemblerait réellement une Nouvelle donne verte visant à inventer une économie mondiale post-pandémie ?
À l’instar du New Deal pensé dans les années 1930 par Franklin D. Roosevelt pour faire face à la Grande dépression, cette Nouvelle donne verte offrirait parmi ses principaux avantages sociaux une création d’emploi. Dans le monde entier, le chômage a explosé du fait de la crise actuelle. L’Organisation internationale du Travail estime qu’en 2020, on compte 8,8 % d’heures travaillées en moins à l’échelle mondiale par rapport à 2019, soit l’équivalent de 255 millions de postes à temps plein. Et, par un heureux concours de circonstances, la production d’énergies renouvelables est (du moins pour l’instant) plus « créatrice d’emploi » que les combustibles fossiles. Cela suggère que cette transition devrait stimuler le marché du travail d’une manière générale. Un programme massif d’isolation de millions de bâtiments et de rénovation de milliards de logements avec des systèmes de chauffage à émissions de carbone faibles ou nulles (comme les pompes à chaleur aérothermiques ou les chaudières électriques) serait également une source de nouvelles embauches et de nouveaux revenus pour les travailleurs.
Une Nouvelle donne verte obligerait les États à abandonner toutes les subventions liées aux énergies fossiles qui sont encore versées aux entreprises et aux ménages. Elle nécessiterait également qu’ils taxent davantage les activités fortement émettrices de carbone, comme le transport aérien et les voitures à essence ou au gazole. En se positionnant de la sorte, un certain nombre d’États seront confrontés à une forte résistance de la part de différents lobbies. Pour contrecarrer cet effort de lobbying et gagner la bataille de l’opinion publique, les systèmes étatiques devront prendre des mesures rapides et décisives afin de soutenir le revenu des ménages au travers de la transition énergétique, par la redistribution aux consommateurs les moins favorisés des recettes générées par les taxes sur le carbone. En effet, ces agents économiques sont frappés par l’augmentation du coût de la vie […].
Vous aimez la science-fiction ? Découvrez « Terra Botanica », une nouvelle originale écrite par Jean O’Creisren…
Leonardo se pose beaucoup de questions. Ce travail a-t-il vraiment du sens ? Certes, il gagne bien sa vie. Oui, mais après ? Cette activité très lucrative le rend-il vraiment heureux ? Est-elle au service du bien commun ? Leo est indispensable à son entreprise. Contrairement aux autres, il a eu la chance de faire des études à Agrocampus, à Angers, tandis que son futur employeur finançait le développement de son haut potentiel. Bien sûr, il n’en parlait pas à ses camarades de promotion. Il disait juste qu’il voulait travailler dans la recherche en botanique, mais le reste de son parcours était top secret. D’ailleurs, depuis qu’il est retourné dans son pays, il n’a plus aucun lien avec ces étudiants français. Et c’est sans doute mieux ainsi.
Oui, ce travail si bien rémunéré dans ce laboratoire lui pose question. Quinze ans après son retour, il est en pleine crise de la quarantaine. Mettre au point des plantes de plus en plus psychotropes et addictives pour ce cartel latino-américain lui paraît vide de sens. Toute cette délinquance, tous ces massacres, toutes ces vies gâchées… Mais s’il dit mierda à son employeur, c’est la gâchette à coup sûr…
Le marché s’épuise, les drogues classiques ne se vendent plus tellement ; il faut innover. Une étude de marché fait ressortir une nouvelle demande de la part des consommateurs : une plante euphorisante, dégageant un gaz ou une énergie qui les mettrait dans une joie dynamique et qu’ils pourraient avoir chez eux. Il y travaille avec professionnalisme, mais sans grande conviction. Il est résigné, comme un esclave, comme un robot.
Dans ce bidonville de San Porro del Mono, le cartel local règne en maître. L’État a déserté les lieux depuis longtemps et la population fait confiance à ces bandits qui sortent les pauvres gens de la misère par le clientélisme. Le seul contre-pouvoir sérieux est l’Église catholique. Les prêtres, les religieux et les religieuses, qui vivent pauvres parmi les pauvres, sont aux côtés des toxicomanes, des enfants des rues et des prostituées. Ils ne cautionnent pas la mainmise des narcotrafiquants, mais ils sont bien obligés de fermer les yeux s’ils veulent rester en vie. Même certains dealers se montrent très croyants et arrosent généreusement la quête du dimanche avec leur argent sale. Le curé de la paroisse, le père Francisco, est un homme très respecté. Il est d’une très grande cohérence : généreux, bienveillant et franc, il vit sobrement et se met toujours au service d’autrui. Sa prédication est toujours remplie de sagesse et il s’adresse de manière accessible aux paroissiens qui, pour beaucoup, ne sont jamais allés à l’école. Croyants ou non, tout le monde l’admire et l’appelle ElSanto, « le saint ».
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Latif est désespéré. Et il n’est pas le seul. Dans le royaume de Dar ez-Zoulm, une grande partie de la population déprime. Tout va très bien pour les Zoulmites. Leur vie est paradisiaque : villas, piscines, voyages à l’étranger, festins réguliers. Mais pour les travailleurs originaires d’Asie du Sud-Est, c’est l’enfer. Venus pour pouvoir envoyer de l’argent à leur famille, ils sont payés misérablement. Ils sont entassés dans des logements insalubres, travaillent comme des bêtes et n’ont aucun moyen pour protester. Certains préfèrent se suicider pour que leurs familles puissent toucher l’argent des assurances. Quant aux jeunes filles, elles sont forcées à la prostitution.
L’Occident est complice de cette monarchie injuste. La richesse du royaume vient de ses nombreux gisements de pétrole, exploités par la multinationale Petroflouz. Latif et ses compagnons travaillent sur les puits d’extraction. Ils y font les métiers les plus dangereux et nombre d’entre eux sont tombés malades à cause de la pollution. Les Zoulmites habitent loin de ces bagnes et ne sont donc pas exposés à ces problèmes. D’ailleurs, se rendent-ils vraiment compte de ce que subissent les populations « accueillies » sur leur territoire ?
Latif marche seul dans le désert. Il se sent comme une victime. Il se croit beaucoup trop gentil pour résister aux injustices et prie Allah de lui venir en aide. Dans son Pakistan natal, on adore le même Dieu qu’ici. Pourquoi les croyants de Dar ez-Zoulm agissent-ils de la sorte ? Le Coran ne dit-il pas que tous les musulmans sont frères ?
Soudain, il trébuche et tombe à plat ventre. Il regarde quelle pierre l’a fait choir. À son grand étonnement, il s’agit d’une lampe, exactement comme celle d’Aladin. Incrédule, il la frotte pour voir quel sera le résultat…
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Adila pleure sur ses enfants. Elle les aime. Elle connaît tous les trésors qui se cachent en eux. Mais la vie ne les a pas aidés. C’est comme si le sort s’était acharné sur toute la famille. Abbas, l’aîné, est devenu chef de bande. Il a rapidement compris qu’il aurait plus d’avenir dans le trafic de drogue qu’en tentant de suivre les cours dans ces établissements de ZEP où les professeurs sont dépassés.
Abra, la deuxième de la fratrie, est beaucoup plus raisonnable. Elle a toujours été studieuse et a toujours montré le bon exemple à ses frères et sœurs. Mais elle souffre d’asthme sévère à cause de l’environnement dans lequel se trouve la cité. En effet, Tutiroutupointes est coincée entre une bretelle d’autoroute et une raffinerie de pétrole tenue par Petroflouz, dans la banlieue nord de Marseille. Et les ferries à quai n’arrangent rien ! De nombreux problèmes de santé touchent ces populations qui n’ont pas les moyens de vivre ailleurs : maladies respiratoires, cancers, problèmes psychiques, voire malformations des fœtus et déficiences intellectuelles.
Dakwan, le troisième enfant de Badreddine et Adila, est très intelligent. Petit, il était curieux et s’intéressait à tout. Mais la crise d’adolescence fait des dégâts. Au collège de Tutiroutupointes, il ne fait pas toujours bon être un « intello ». Les enseignants voient que ce jeune a du potentiel, mais il préfère rester légitime auprès de ses copains que passer pour le « fayot de service », même si son grand frère est tellement craint que personne n’oserait le toucher. D’ailleurs, Dakwan s’identifie plus à Abbas qu’à son père. Ce dernier est âgé et il ne parle même pas français. Il ne travaille pas et c’est l’aîné caïd qui fournit l’argent à la maison.
Les deux derniers, Bahij et Faïda, font la consolation de leurs parents. Ils vivent encore de la fraîcheur de l’enfance, mais pour combien de temps ? Bahij est enjoué, et son sourire radieux emplit la maison. Il fait souvent le clown et apporte un peu de rire dans cette ambiance morose. Faïda est pleine de bienfaits pour sa famille. À quatre ans et demi, elle est déjà coquette, elle bute sur les mots et attendrit tout le monde, du terrible Abbas à la sérieuse Abra, du Dakwan peu assuré aux deux parents angoissés par leurs trois aînés.
Cette famille est un exemple type de ce qui se passe dans cette cité : chômage, discrimination, pollution, maladies, manque d’avenir, délinquance, mais aussi solidarité et vie. À Tutiroutupointes, tout le monde souffre de ces injustices. Mais, comme dans chaque cité de France et de Navarre, tout le monde se connaît. Donc s’ils veulent s’unir pour faire la révolution, ils en ont les moyens. Le tout est de la faire intelligemment…
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Le père Francisco se lève. L’évangile est lu, il va enchaîner avec son homélie. On vient de lui diagnostiquer un cancer en phase terminale, mais il ne l’a dit à personne. Il n’a donc rien à perdre. Tout le monde attend avec impatience ce qu’il va dire. Après un long silence, il commence enfin son prêche :
« Quel avantage, en effet, un homme a-t-il à gagner le monde entier si c’est au prix de sa vie ? »
Il s’arrête. Toute l’assemblée retient son souffle. Que va-t-il tirer de cette citation de l’évangile de Matthieu ?
« Mes amis, que signifie cette phrase pour nous aujourd’hui ? »
Pas de réponse.
« San Porro del Mono est remplie de gens bien. Vous êtes des gens bien. Vous êtes des enfants de Dieu et vous avez été créés pour faire le bien. »
Silence.
« Mais malgré cela, San Porro del Mono est remplie de violence, de misère et d’injustice. Pourquoi ? »
Silence.
« Eh bien parce que le démon y fait son œuvre ! Il y a, dans ce bidonville, des gens qui ont vendu leur âme au diable. Ils gagnent des milliers de pesos, ils ont des piscines, des femmes à volonté, parfois ils vont à l’église et donnent leur argent sale à la quête ou aux plus pauvres. Ils gagnent le monde entier, mais ils sont sur le chemin de l’enfer. Et vous, vous êtes complices ! Vous acceptez cette servitude ! Or Dieu nous a créés pour l’amour, pour la liberté, pas pour cette complaisance avec le mal ! Dieu est plus fort que le diable ! L’amour est plus fort que la mort ! N’ayez pas peur et osez résister aux narcotrafiqu… »
Le sermon du padre est interrompu. Une balle vient de s’encastrer au milieu de son front. Personne ne sait d’où ça vient, mais le tireur a un message implicite pour l’assemblée : « Si vous faites ce qu’il vous a dit, il vous arrivera la même chose ! »
Dans ce bidonville, violence et religion sont omniprésentes. Les habitants en ont assez de la violence et la religion est leur seul refuge — avec la drogue, pour beaucoup. Les paroles d’El Santo ont retenti. Si tous les prêtres ne sont pas irréprochables, celui-ci était très aimé car il était très cohérent. Il a témoigné de ses convictions jusqu’au don de sa vie. Alors il est temps de reprendre le flambeau et de faire la révolution…
Le soir même, un groupe de personnes se réunit dans le plus grand secret. Les leaders de tous les groupes sont représentés : les syndicalistes, les religieux, les enfants des rues, les prostituées, les colporteurs… Seuls les trafiquants manquent à l’appel. Le conseil secret réfléchit à la manière dont il peut renverser ce régime narcocrate.
– Il faut faire table rase du passé, annonce Felipe, un leader syndical d’âge mûr. Il faut prendre les armes pour renverser ce régime impérialiste ! Barricadons-nous ! ¡¡El pueblo unido jamás será vencido!![1]
– La violence ne résout rien, rétorque sœur Teresa. Pensez à Jésus, qui a sauvé le monde sur la croix. Pensez au pasteur Martin Luther King qui a fait changer les États-Unis par la non-violence…
– Je ne crois pas à votre Bon Dieu des Bisounours, ma p’tite dame ! Est-ce qu’Hitler est tombé de cette manière-là ? Nous avons affaire à des tarés ! Contre le fascisme et la dictature capitaliste, seule la révolution peut changer les choses !
– Et que pensez-vous d’une révolution non-violente ?
Tous se tournent vers Miguelito. De sa petite voix, le chef de bande des enfants des rues vient d’intriguer l’ensemble du conseil.
– Explique-toi, reprend María Magdalena, directrice de la maison clause du quartier.
– Eh bien, nous pourrions lancer une grève du manque !
– Une quoi ? répondent-ils tous en chœur.
– Une grève du manque ! C’est le même principe que la grève de la faim, mais avec la drogue. Tous les toxicomanes du bidonville arrêteraient de consommer jusqu’à ce que les narcos dégagent…
Devant les explications de l’enfant, tous éclatent de rire.
– Tu es jeune et sans expérience, Miguelito, reprend jovialement Melquíades, le porte-parole des colporteurs. Mais tu apprendras avec la vie qu’un toxico ne peut pas se passer de drogue comme ça. C’est une maladie et on n’en sort que très rarement à coups de bonne volonté.
– J’ai peut-être l’air jeune, mais j’ai bien plus d’expérience que vous ne le croyez. Nous, les enfants des rues, nous ne sommes pas du tout naïfs. Nous sommes des experts en matière de délinquance et de défonce. Et d’ailleurs, je ne suis même pas un enfant, mais un extraterrestre !
Devant cette nouvelle remarque, c’est un fou rire incontrôlable qui saisit toute l’assemblée. C’est à croire que le garçon vient de dévorer un space cake ! Mais tout à coup, les rires se transforment en cris de peur. En effet, ce n’est plus un enfant qui se dresse devant eux, mais un cloporte vert géant, avec des tentacules à la place des pattes. Il disait donc vrai !
– Ça vous fait peur ? Rassurez-vous : je vais vous effrayer encore davantage !
À la place de l’alien, les conseillers voient un jeune homme d’une trentaine d’années, l’air introverti. Ils crient en effet de plus belle, car c’est l’une des dernières recrues des narcotrafiquants. C’est Judas, l’assistant de Leonardo au laboratoire.
– N’ayez pas peur ! J’ai beau avoir un nom de traître, ce sont les narcos que je trahis. Si vous m’écoutez bien sagement, je vous indiquerai comment mener votre révolution. Mon vrai nom est Ra-Rho. Je viens d’une planète nommée Terra Botanica, qui est à un million d’années-lumière de la vôtre. D’ailleurs, ce nom est aussi celui d’un parc à thème dans l’ouest de la France, mais les responsables politiques locaux n’ont pas fait exprès de copier sur nous. Ils ne connaissaient pas l’existence de ma terre natale, donc nous ne pouvons pas les accuser de plagiat. Sur ma planète, la vie animale et végétale est foisonnante. On y trouve notamment une multitude d’espèces de plantes magiques. Avec deux collègues, j’ai été envoyé en mission pour aider les Terriens. Mon camarade Ra-Rib a été parachuté au Moyen-Orient, où il se fait passer pour un génie dans une lampe. Quant à Zarbi, il s’est déguisé en chômeur qui profite du système dans la banlieue de Marseille, en France. Nous communiquons par télépathie pour coordonner des insurrections qui changeront la face du monde. Donc ce qui se joue ici, à San Porro del Mono, servira toute l’humanité. Ça vous va ?
Tous acquiescent en silence.
– Bien, reprend Ra-Rho. Alors, la première plante que je vous propose est la tripa gerba. Elle agit sur l’ADN et provoque une mutation génétique ainsi qu’un profond dégoût pour tout type de drogue. En même temps, elle supprime tous les symptômes liés au manque et répare toutes les lésions dues à la consommation. Depuis mon recrutement au labo, j’en ai mis dans toutes les marchandises exportées à l’étranger. C’est pour cela que le marché s’essouffle et que les narcos sont de moins en moins généreux envers les pauvres du quartier. Cette situation nous aidera à gagner le soutien des habitants. Nous allons donc donner de la tripa gerba à tous les toxicos qui veulent en finir avec leurs tortionnaires. En échange, ils feront savoir haut et fort qu’ils entament la grève du manque. Ça vous va ? Vous avez des questions ?
– J’espère que nos cris de rire et de peur ne nous ont pas fait repérer, s’inquiète María Magdalena.
– Pas de problème, répond Ra-Rho. J’ai brouillé les ondes pour que cette maison semble déserte à toute personne extérieure à notre groupe.
– J’ai une autre question, demande Felipe. Comment as-tu fait pour venir jusqu’ici si ta planète est aussi loin ?
– Bah ! Enfin ! Par téléportation ! Quelle question !!!
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* *
Ra-Rib a réuni les ouvriers d’Asie du Sud-Est dans un endroit secret. Sans leur dire, lui aussi a agi sur les ondes pour que personne ne puisse les y trouver.
– Alors, vous en avez marre de cette exploitation de la bourgeoisie pétrolière ?
– Ouais ! Aux chiottes les Zoulmites !
– À Dar ez-Zoulm, on va tous les bouffer comme des loukoums !
– Je comprends votre colère, camarades ! Mais attention : nous allons agir de manière non-violente. Souvenez-vous de Gandhi, qui a réussi à libérer la plus grande démocratie du monde sans armes. Combien parmi vous sont indiens ? Bien, je vois beaucoup de mains levées ! Je vous propose de faire grève. Petroflouz sera bien emmerdée si les puits n’extraient plus rien, et les Zoulmites aussi !
– Mais comment veux-tu qu’on fasse grève de manière non-violente sans se faire taper dessus ? interroge un ouvrier au fort caractère originaire d’Indonésie.
– Eh bien avec ça, répond Ra-Rib en sortant de sa poche un petit pot, le corpus diamantis !
– Le quoi ?
– C’est une plante magique. Vous en mangez et personne ne pourra vous blesser. Votre corps deviendra si dur que ce sera l’arme qui cèdera.
Devant cette déclaration, tous éclatent de rire. Ça leur fait du bien : ces hommes n’ont pas ri comme ça depuis des mois, voire des années. Au bout d’un moment, Ra-Rib prend son apparence bleuâtre de génie et s’amuse à entrer dans la lampe, puis à en ressortir par intermittence.
– Mâ shâ’ llâh ! s’écrient les ouvriers en chœur.
– Ça vous épate, hein ! Alors ? On croit aux plantes magiques, maintenant ? Bon, dit-il après avoir repris son apparence humaine, Latif, prends ce couteau à viande et coupe-moi le bras !
– Non, je ne pourrai jamais faire ça !
– Femmelette ! répond l’Indonésien en lui arrachant l’arme des mains. C’est un génie, ça va rien lui faire !
Et l’homme tranche d’un coup sec le bras de Ra-Rib, qui part à l’autre bout de la salle. Le sang gicle à flots, mais le membre repousse sur-le-champ.
– Pourquoi le bras est-il parti ? Parce que je n’avais pas pris de corpus diamantis ! J’en mange donc une bouchée… Mmmh… Ch’est bon ! Et là, tranche-moi le bras pour voir !
L’Indonésien recommence, mais c’est le couteau qui vole en éclats. Alors, tout le monde se rue vers le génie pour pouvoir se gaver de la plante magique.
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* *
Les sages du quartier fument la chicha sur la place principale de Tutiroutupointes.
– Ah, mon bon vieux Hakim… La vie n’est plus ce qu’elle était ! Nous, on essayait de s’intégrer. Mais pour nos petits-enfants, c’est bien plus difficile…
– Comment veux-tu t’intégrer quand la police te contrôle tout le temps, quand l’école n’est plus une garantie de réussite, quand l’air est trop pollué pour que tu puisses te développer normalement ?
– Salam calikoum, mes oncles !
– Abbas ! Comment vas-tu, mon grand ?
– Pas fort ! Les affaires ne marchent plus trop, en ce moment… Quand il s’agit des clients qui ne fument que du shit marocain, il n’y a aucun problème. Mais ceux qui touchent à la came latino-américaine nous lâchent complètement ! Il y en a même qui dégueulent sur mes dealers ! J’ai dû arrêter de travailler avec mes fournisseurs de San Porro del Mono. C’est à croire que leur marchandise est maudite !
– Salut la compagnie !
– Tiens ! Salut Kevin ! Ça roule ?
– Putaing, oui ! Toujoure la frite !
– Bah t’as de la chance ! T’es bien le seul ici… Tiens, v’là Amady !
Un homme de type subsaharien se dirige vers eux. Avec ses 140 kilos, il a du mal à se déplacer. Il arrive en sueur pour saluer les uns et les autres.
– Alors, j’ai l’impression que ça va pas fort !
– Ce n’est pas qu’une impression !
– Et si on changeait tout ça ?
– Comment veux-tu que ça change ?
– Ben… En faisant la révolution !
– T’es sérieux ?
– Très sérieux ! On est pauvres, on souffre de la pollution. Donc ce qui marche, aujourd’hui, c’est de foutre le bordel pour se faire entendre. Il y a eu les Gilets jaunes, il y a eu la Marche pour le climat. Je vous propose donc « la Marche des pauvres pour le climat ». Nous bloquerons les ronds-points avec des gilets verts fluorescents 100 % naturels…
– Attends, Amady ! T’es mignon, mais depuis qu’on te connaît, tu passes ta vie devant la télé à bouffer des chips et à fumer des pétards, tu profites de toutes les allocs possibles et tu nourris la réputation des étrangers qui profitent du système. Donc tu vas arrêter avec tes idées à la con ! Déjà, on n’est pas assez riches pour financer un truc pareil, et en plus, des gilets fluorescents 100 % naturels, ça n’existe pas !
– Bon, déjà, je n’y suis pour rien si je ne trouve pas de boulot. Les employeurs ne sont pas nécessairement racistes, mais quand on s’appelle Amady Coulibaly, c’est vachement plus dur d’avoir un job !
– Rien ne t’empêche de changer de nom !
– En France, c’est un handicap, mais au Bled, c’est un atout. Je peux être ami sur Facebook avec tous les Coulibaly que j’y trouve. J’en ai même invité un qui a lancé des plantations de coton bio au Mali. On pourrait s’en servir pour tisser nos gilets tout en favorisant le commerce équitable…
– Et avec quoi tu vas financer tout ça ? Avec ton RSA, tes APL et ton AAH basée sur ton handicap fictif ?
– Je peux trouver des financements, interrompt Hakim. Je suis parent avec le rappeur Karim Kif-Edderim. Il est très riche et très généreux. En plus, il ferait certainement une chanson pour soutenir notre mouvement.
– Bien, reprend Abbas. Et la teinture fluorescente naturelle ?
– Regarde-moi ça ! Cette poignée d’herbes nous changera la vie ! C’est de la stabylota verda. Tu teins du coton avec ce truc et tu as de beaux gilets verts…
– Je te croirai quand tu m’auras fait une démonstration.
– Très bien, cher Abbas ! Viens chez moi et je te montrerai. Tu peux me croire. Demande aux gens du quartier ! J’ai l’habitude de tromper l’État français, mais pas mes frères de la cité. D’ailleurs, je suis l’un de tes clients les plus fidèles et je t’ai toujours payé comptant.
– Pas faux ! Montre-moi ça, qu’on puisse enfin changer la vie de tous les banlieusards !
*
* *
Pablo est désespéré. San Porro del Mono s’est complètement retourné contre son clan. La grève du manque a bien pris. Plus personne n’achète sa marchandise, ni ici ni ailleurs dans le monde. Son personnel se met en grève et refuse de massacrer les rebelles. À la télévision, il voit que l’entreprise Petroflouz est, elle aussi, en difficulté. Les ouvriers sont en grève à Dar ez-Zoulm et les Zoulmites plient devant eux depuis que le monde entier a vu les corps invincibles des esclaves brisant les armes de la répression. Ça fait le buzz, tout comme les manifestations des Gilets verts en France. Il y a différentes insurrections, mais pour quel résultat ? Partout, la situation est bloquée. Si on se soulève, il faut que ça serve à quelque chose. Pour l’instant, Petroflouz et les narcotrafiquants sont dans une situation critique, sans que rien ne s’améliore pour les insurgés. Ces derniers protestent, mais ne proposent aucune alternative concrète. Pablo sort son revolver, le charge et met le canon dans sa bouche.
« Boum ! »
Le dirigeant du cartel se retourne. Leonardo vient de frapper un grand coup sur la porte.
– J’ai une bonne nouvelle, patron !
– Ça existe encore, les bonnes nouvelles ?
– Vous vous souvenez de cette plante euphorisante que vous m’aviez demandée il y a quelques mois ? Judas m’a aidé à…
– Qu’est-ce que j’en ai à foutre, maintenant ? La drogue, ça ne marche plus ! Il faut innover, se reconvertir, et nous n’avons plus le moindre peso à investir là-dedans !
– Justement, Judas a trouvé un truc pas mal : le cactus ecologicus. Si on dépose un brevet, on peut sauver la compagnie, le bidonville et le monde entier avec !
*
* *
Cinq ans se sont écoulés. En partenariat avec Petroflouz, le cartel de San Porro del Mono a développé des plantations de cactus ecologicus dans le désert de Dar ez-Zoulm. Les ouvriers agricoles d’Asie du Sud-Est sont très bien payés et envoient des biodollars qui participent largement au développement de leur pays d’origine. Le cactus ecologicus absorbe le dioxyde de carbone en grande quantité. Il peut même en attirer à des milliers de kilomètres. Une partie du carbone sert à la photosynthèse. Une énorme quantité de dioxygène est recrachée dans l’atmosphère, ce qui a un effet euphorisant. Les ouvriers sont donc très heureux et dynamiques au travail. Une autre partie du carbone est stockée dans le sol. Mais avec le cactus ecologicus, on fait surtout du biocarburant non polluant et du plastique biodégradable. Cela est notamment fabriqué dans des usines situées dans les quartiers sensibles. À Tutiroutupointes, la raffinerie Petrovert (anciennement Petroflouz) est devenue une usine éthique, qui emploie la main-d’œuvre locale dans des conditions de travail rêvées. Le jeune Dakwan vient d’obtenir son baccalauréat avec mention très bien. Après la classe préparatoire et une école d’ingénieur, il espère intégrer cette société dans laquelle son grand frère est manager. À San Porro del Mono, le cartel vit grassement du brevet lié au cactus ecologicus. Le bidonville n’en est plus un. C’est un quartier où il fait bon vivre, comme à Tutiroutupointes, à Dar ez-Zoulm et partout ailleurs. La Terre est moins polluée et les Terriens ont enfin compris que c’est par la justice et l’équité qu’ils peuvent réellement être heureux.
[1] « Le peuple uni ne sera jamais vaincu ! » Slogan marxiste très souvent utilisé dans le monde hispanique.
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Jour après jour, nous faisons beaucoup dans un seul but : être heureux. Mais souvent se produit quelque chose qui modifie les critères : nous confondons le bonheur avec le succès.
Nous voulons que nos actions donnent du résultat, et en donnent immédiatement. Si cela ne se réalise pas, nous avons l’impression d’avoir perdu notre temps et nous essayons autre chose. Il doit bien être possible d’acquérir la gloire !
En cherchant à atteindre nos buts par cette allée et venue constante, nous finissons par être doublement angoissés : nous ne remplissons pas nos objectifs et, pire encore, nous ne sommes pas heureux.
ALORS, DANS LES MOMENTS OÙ VOUS SENTEZ QUE RIEN DE CE QUE VOUS ENTREPRENEZ NE PORTE SES FRUITS ET QUE LA VIE DEVIENT TRÈS DIFFICILE, QUAND VOUS AVEZ ENVIE DE RENONCER À TOUT PARCE QUE CELA N’A AUCUN SENS, SOUVENEZ-VOUS DE LA FABLE DE LA FOUGÈRE ET DU BAMBOU.
Il était une fois un menuisier qui semblait mener une vie comblée. Il gérait son atelier ; il vivait auprès d’une femme qu’il aimait et avait deux enfants. Mais un jour, il commença à recevoir moins de commandes. Des problèmes économiques se déclarèrent donc pour lui et pour sa famille.
Cet homme voulait prendre soin de son activité professionnelle. Pour ce faire, il commença à essayer plusieurs méthodes afin de relancer son atelier, mais aucune ne produisait un quelconque résultat. Ses problèmes économiques commencèrent à générer des soucis avec sa femme. Les voyants tristes et en conflit, les enfants se mirent à rencontrer des difficultés à l’école.
Le menuisier se sentait découragé : rien de ce qu’il entreprenait ne semblait avoir du sens, étant donné que les choses allaient de pire en pire. Un jour, sur le point de jeter l’éponge, il décida d’aller dans les bois pour discuter avec un vieux sage.
Après avoir marché pendant une demi-heure, il rencontra ce dernier. Le vieil homme vivait dans une humble maison. Voyant le menuisier, il l’invita à passer prendre un thé. Il remarqua l’inquiétude sur son visage et lui demanda ce qui lui arrivait. L’artisan conta ses mésaventures au sage, qui l’écouta avec attention et sérénité.
Quand ils eurent fini de boire le thé, le vieil homme invita son hôte à l’accompagner vers un jardin magnifique qui se trouvait derrière la maison. La fougère et le bambou trônaient au milieu de dizaines d’arbres. Le sage demanda au menuisier d’observer les deux plantes et lui annonça qu’il devait lui raconter une histoire.
« Il y a huit ans, j’ai pris quelques graines et j’ai semé la fougère et le bambou au même moment. Je voulais que ces deux végétaux croissent dans mon jardin, car tous deux me sont d’un grand réconfort. J’ai mis tout mon cœur à prendre soin de l’un et de l’autre comme s’il s’agissait d’un trésor. »
« Peu après, j’ai remarqué que la fougère et le bambou répondaient à mes soins de manière différente. La fougère a commencé à éclore et, en à peine quelques mois, elle est devenue une plante majestueuse qui ornait l’ensemble du jardin par sa présence. En revanche, le bambou restait sous terre, sans donner signe de vie. »
« Une année entière s’est écoulée, au cours de laquelle la fougère continuait à se développer, mais pas le bambou. Néanmoins, je n’ai pas baissé les bras. J’ai continué à m’en occuper avec plus grand soin. Malgré cela, une autre année s’est écoulée et mon travail n’a porté aucun fruit. Le bambou refusait de se manifester.
Je n’ai pas non plus baissé les bras après la deuxième année, ni après la troisième, ni après la quatrième. Au bout de cinq ans, j’ai enfin vu qu’un jour une brindille timide émergeait delaterre. Le lendemain, elle était beaucoup plus grande. En quelques mois, elle a poussé sans s’arrêter et est devenue un prodigieux bambou de 10 mètres. Sais-tu pourquoi ce dernier a mis tant de temps à sortir de terre ? »
Après avoir écouté l’histoire, le menuisier n’avait pas la moindre idée de la raison pour laquelle le bambou avait tant attendu pour se manifester. C’est alors que le vieil homme lui déclara :
« Il a mis cinq ans car, pendant ce temps, la plante était occupée à développer ses racines. Elle savait qu’elle devait croître jusqu’à atteindre cette hauteur impressionnante. C’est pourquoi elle ne pouvait pas sortir de terre avant de disposer d’une base ferme qui lui permette de s’élever de manière satisfaisante. Comprends-tu ? »
Alors le menuisier comprit que toutes ses luttes étaient destinées à développer ses racines. Par ailleurs, le fait de ne pas voir les fruits de son travail pour le moment ne signifiait pas qu’il perdait son temps, mais qu’il devenait plus fort.
Avant de le laisser partir, le sage fit part à son hôte d’un dernier message :
« Le bonheur te permet de rester doux. Les tentatives te permettent de rester fort. Les peines te permettent de rester humain. Les chutes te permettent de rester humble. Le succès te permet de rester brillant. »
Cette histoire doit vous rappeler que peu importe le temps que mettent les choses à porter leurs fruits. Dans les moments difficiles, le plus important n’est pas de chercher à voir les résultats à tout prix.
En revanche, il est fondamental de travailler avec ardeur au développement de vos racines. En effet, c’est seulement grâce à elles que vous pourrez croître et devenir la meilleure version de vous-même.
Source : “La fábula del helecho y del bambú que deberías leer cuando pases por un momento difícil”, conte écrit par Rocío Belén Suárez et publié sur La mente es Maravillosa ainsi que sur le site internet de Bioguia [consulté le 27 mars 2021 ; mis à jour le 10 décembre 2020]
La pauvreté est un mal à combattre. Mais quand cette lutte s’avère difficile, comment laisser des aspects positifs s’en dégager ?
« Éloge de la pauvreté » ? Peut-on chanter les louanges d’un phénomène qui cause autant de souffrance ? N’est-ce pas manquer de respect aux plus démunis ? N’est-ce pas rire de leur malheur ?
Si telle était ma démarche, vous auriez raison de vous scandaliser, de quitter ce blog et de condamner ouvertement les écrits de Jean O’Creisren. Mais sachez que si je prends la parole sur ce sujet délicat, c’est que j’en ai une expérience sensible. En effet, je vis dans un logement social, j’ai déjà été chômeur, bénéficiaire du RSA et j’ai même vécu l’expérience de la mendicité. Aujourd’hui, ma situation est moins critique qu’elle ne l’a été, mais en fonction des opportunités professionnelles, il m’arrive de connaître des périodes de bien-être matériel comme de précarité. En outre, depuis mon adolescence, je suis au contact de personnes plus ou moins à l’aise financièrement. Il y a, parmi mes amis, des personnes qui gagnent bien leur vie et d’autres qui bénéficient des minima sociaux.
Le but de cet article n’est ni de me moquer d’une situation dramatique ni de vous inciter à devenir pauvre. Je ne proposerai pas non plus de solutions politiques face à la pauvreté. Cette dernière est un mal qu’il faut combattre et je laisse les citoyens de différentes couleurs politiques débattre sur les mesures à prendre pour avancer en la matière. Mais lorsque ce mal vous tombe dessus et qu’il est difficile de lui faire face, comment l’accueillir ? En cette période de crise, nous sommes malheureusement nombreux à nous paupériser. Nous sommes tous humains et la tentation du découragement est toujours là. Mais ne nous laissons pas abattre ; osons regarder les lueurs d’espoir et autres aspects positifs qui peuvent se dégager de ce nuage sombre…
La pauvreté vous rend plus humble
J’ai la chance d’avoir grandi dans un milieu plutôt favorisé, même si j’ai été confronté à la pauvreté assez tôt. Lorsque j’étais étudiant, je me souviens avoir parlé à Christophe, une personne qui faisait la manche devant une église. Croyant bien faire, je lui ai dit : « Il faut chercher du travail ! » Il m’a répondu, blessé : « Arrêtez de me faire la morale ! » N’ayant pas encore connu la pauvreté, j’étais incapable de me mettre à la place de celui qui en souffre. Quelques années après, je venais de subir un cuisant échec professionnel et j’étais au chômage. J’ai revu Christophe et lui ai parlé de manière plus respectueuse. J’ai pu le traiter d’égal à égal, puisque nous étions tous les deux dans la même galère. Sur un ton bienveillant, il m’a dit : « Tes parents peuvent t’aider. » Et il avait raison, lui qui avait été chassé de chez lui à l’âge de 13 ans.
À cette époque, je commençais à effectuer des maraudes avec ce qui allait devenir l’Oratoire Bienheureux Noël Pinot. Nous allions à la rencontre des personnes de la rue sans rien leur apporter, mais juste pour leur parler de Jésus. Vous vous doutez bien qu’elles étaient plus ou moins réceptives à notre discours d’évangélisation. En effet, quand un SDF n’apprécie pas votre approche, il n’y va généralement pas par quatre chemins pour vous le dire. 😉 Je me souviens aussi qu’en arrivant à l’arrêt de tram qui surplombe la gare, nous cherchions des personnes de la rue avec qui aborder le sujet de la foi. Quelqu’un nous a demandé : « Les gars, vous cherchez quelque chose ? » Nous recherchions plutôt quelqu’un, et nous n’osions pas trop expliquer notre démarche, qui eût paru étrange à notre interlocuteur. Celui-ci a donc interprété à sa manière notre attitude : « Vous cherchez du matos ? » « Non, absolument pas, mais on peut te parler de Jésus ! » Et nous voilà lancés dans une conversation métaphysique avec un dealer professionnel… À la fin de la discussion, nous lui avons demandé son nom pour pouvoir prier pour lui. De crainte que nous le dénoncions, il nous a donné son pseudonyme. Nous avons donc prié pour Jo la Douille.
Bref, ces premières maraudes ont été très enrichissantes. Si j’ai pu m’entretenir fraternellement avec ces personnes, c’est parce que je traînais mes propres misères. À cette époque, j’étais étiqueté comme un chômeur, un dépressif et un raté. J’étais tombé de mon orgueil et les souffrances de la vie m’avaient rendu plus humble. Et, croyez-moi, l’humilité est une vraie richesse ! Si vous fraternisez avec les personnes en situation de précarité, elles pourront vous aider le jour où vous aurez besoin d’elles.
La pauvreté vous rend plus sensible à la souffrance des autres
L’été dernier, j’ai terminé le pèlerinage vers Saint-Jacques-de-Compostelle que j’avais commencé en 2012. Ayant subi quelques difficultés financières lors de ma pérégrination, j’ai dû me serrer la ceinture pendant quelques jours et j’ai décidé de mendier dans la ville de León. Assis dans un coin de la Plaza Mayor le jour du marché, je disais juste ˝¡Hola!˝ aux passants, sans avoir l’intention de demander de l’argent de manière insistante. Presque tout le monde a détourné le regard et personne ne m’a rien donné. Seule une femme m’a poliment répondu ˝¡Hola!˝, ce qui m’a vraiment réchauffé le cœur. Je me demandais ce que les personnes qui m’ignoraient pouvaient penser de moi : « Ce fainéant n’a qu’à aller bosser ! » ou « Qu’il n’aille pas acheter ses bières et son shit avec mon argent ! » Au bout d’une heure, je suis parti, affligé d’avoir été traité comme un pestiféré. Ainsi, j’ai pu expérimenter ce que certaines personnes subissent toute leur vie à longueur de journée. Ce verset biblique me semble maintenant tout à fait concret : « Penche l’oreille vers le pauvre, et réponds avec douceur à son salut de paix. » (Ecclésiastique 4, 8)[1]
Tant qu’on n’a jamais fait la manche, on ne peut pas savoir ce que ça fait. Cette expérience m’a fait comprendre pourquoi certains mendiants sont souvent de mauvaise humeur. Quand vous subissez cela toute votre vie, il y a vraiment de quoi vous plomber le moral ! Alors, uniquement car je suis devenu riche de cette expérience, j’ai décidé de ne plus jamais ignorer une personne qui me demande une pièce ou autre chose. Même si je ne donne rien, je peux toujours décliner poliment et avec le sourire. 😊
La pauvreté vous permet de moins polluer
Quand vous vous inquiétez pour la fin du mois, vous faites des économies qui peuvent être bonnes pour l’environnement : vous utilisez vos pieds plutôt que la voiture, vous roulez moins vite pour économiser du carburant, vous consommez l’électricité et le gaz de manière raisonnée, vous n’achetez que ce dont vous avez vraiment besoin, vous fermez le robinet quand vous vous brossez les dents… Autant de gestes qui sont bons pour la planète ! 😊 En revanche, plus votre budget est réduit, moins vous pourrez consommer des produits de haute qualité environnementale. Mais à titre personnel, même quand je gagnais 800 € par mois, j’arrivais à consommer en respectant à peu près mes convictions en la matière, car je faisais des économies sur d’autres choses. Par exemple, les efforts que je faisais pour consommer moins de carburant lorsque j’étais obligé de prendre la voiture ont eu d’importantes répercussions sur mon pouvoir d’achat. Plus d’informations sur ce lien.
En effet, fournir des efforts en matière d’écologie est à la portée de tous, quels que soient nos revenus. Tout est une question de priorité. Et vous, pensez-vous que le respect de notre écosystème et la survie de l’espèce humaine soient une question prioritaire ?
La pauvreté peut vous permettre de développer des compétences en mathématiques et en gestion
Plusieurs fois, j’ai remarqué que des personnes qui vivent de mendicité sont des génies en matière de calcul mental. En effet, ces personnes comptent en permanence. De même, quand votre budget est serré, vous calculez pour savoir ce que vous avez les moyens d’acheter ou non, vous comparez les prix, vous raisonnez pour savoir comment vous pourrez maximiser votre pouvoir d’achat avec le peu que vous avez. Dans les grandes surfaces, vous chasserez les promotions, tout en évitant de vous faire avoir. Par exemple, si un article affiche 20 % de réduction, je prends le temps de calculer de tête pour savoir si c’est vraiment moins cher que l’article similaire d’une marque différente qui se trouve à côté. Cette gymnastique intellectuelle prend un certain temps, mais quand j’ai pu désamorcer une arnaque de cette façon, je suis fier de présenter à la caisse ce qui est vraiment à mon avantage.
Comme toute gestion de crise, la pauvreté vous oblige à prendre de bonnes décisions, à vous centrer sur vos priorités et parfois à changer radicalement la manière dont vous gérez votre budget. Cela vous permet donc de développer des compétences utiles et d’améliorer les circuits neuronaux relatifs à la prise de décisions. Cela vous rend certainement créatif en mettant à votre disposition de nombreuses ressources à utiliser en cas d’alerte rouge.
La pauvreté peut nous rendre plus forts et nous apprendre à nous battre
Après mon gros échec professionnel, j’ai repris des études pour m’engager dans un métier où il est difficile de trouver du travail. Cette situation était angoissante, même si je n’étais pas à plaindre d’un point de vue matériel. En effet, mon allocation chômage me permettait de vivre avec bien plus de moyens que la plupart des étudiants. Néanmoins, cette peur de manquer à l’avenir était éprouvante. D’après Paulo Coelho, « la crainte de la souffrance est pire que la souffrance elle-même ». Je l’ai vécu dans ma chair. Lorsque j’ai commencé ce métier où il était difficile de trouver sa place, ce n’était effectivement pas facile. C’était même beaucoup plus compliqué que je ne l’aurais imaginé. Mais cela m’obligeait à me battre, à avancer, le nez dans le guidon, sans me poser de questions. Quand ce n’est pas la première galère, on sait comment se battre. Il y a moins d’un an, il m’est arrivé à deux reprises de devoir faire face à des baisses de pouvoir d’achat subites et inattendues. J’ai pris ces situations comme des défis, j’ai immédiatement réfléchi à la manière dont je pouvais faire face et j’ai pu m’en sortir largement vainqueur.
Par exemple, quand j’ai appris, à Sahagún, qu’il me restait juste de quoi payer mon loyer et que je devrais me serrer la ceinture en poursuivant mon pèlerinage vers Compostelle, j’ai vécu comme une aventure de plus le fait de devoir dormir à la belle étoile et me laver dans les canaux d’irrigation. Lorsque j’ai décidé que j’allais faire la manche une fois arrivé à León, j’ai pris cela comme une expérience qui serait formatrice. Certes, la misère n’est pas un jeu et j’espère ne choquer personne avec ces propos. Ayant l’assurance d’avoir du travail en septembre, j’étais dans une situation beaucoup moins angoissante que les personnes qui subissent une précarité durable. Mais si j’avais connu la même galère quelques années plus tôt, j’aurais vraiment paniqué. Les différentes expériences de pauvreté que j’avais subies auparavant m’avaient rendu plus fort et j’ai pu faire face à cette situation la tête haute.
La pauvreté peut vous protéger face à certaines personnes malintentionnées
Pendant plusieurs années, j’ai vécu dans un immeuble très défavorisé. La plupart de mes voisins étaient bénéficiaires du RSA, avaient de gros problèmes d’addictions diverses et variées et avaient connu la prison. L’immeuble était dans un piteux état. Nous avons d’ailleurs été relogés pour qu’il soit détruit. Dans la rue adjacente, des personnes d’un autre niveau de vie habitaient dans des pavillons. Le long de ces maisons, leurs belles voitures étaient souvent incendiées. En revanche, sur le parking en face de mon immeuble, aucun problème de ce type ne se produisait. Il était souvent vide car la plupart de mes voisins n’avaient pas ou plus le permis de conduire. Les rares conducteurs parmi nous avaient de vieilles voitures en adéquation avec notre budget. Et surtout, les brûleurs d’automobiles avaient bien conscience que tout se sait dans un bâtiment comme le nôtre. Tout le monde savait aussi que les riverains n’étaient pas commodes et qu’il valait mieux éviter d’avoir des problèmes avec eux.
En règle générale, si vous avez un vieux tacot, il a moins de risques de se faire incendier qu’une belle voiture. De même, si vous vous habillez modestement, vous ne vous ferez pas braquer dans la rue. Au Moyen Âge, les communautés juives d’Europe utilisaient cette technique de survie. Soupçonnés de rouler sur l’or, les Israélites ne montraient aucun signe extérieur de richesse pour éviter les pogroms et autres agressions antisémites. Dans la même logique, si vous n’avez aucun objet de valeur chez vous, les cambrioleurs seront moins intéressés par votre logement que par une belle demeure.
Enfin, face aux commerciaux sans scrupules et autres arnaqueurs, la pauvreté vous protège. Si vous avez un caractère à vous faire avoir facilement, il est plus facile de refuser quand on n’a pas le budget qui permettrait d’accepter avec une confiance aveugle.
Nous sommes d’accord que la pauvreté reste un mal à combattre. Mais ce mal peut vous protéger contre sa propre aggravation…
La pauvreté vous permet de vous remettre dans les mains de Dieu
Quand on est pauvre, on est plus sensible à la souffrance des autres. On voudrait donc être riche pour pouvoir les aider matériellement. Faute de pouvoir donner aux plus démunis, on peut donc offrir sa pauvreté à Dieu pour telle personne ou telle cause. Le Dieu des chrétiens est un Dieu d’amour. Il ne veut jamais le mal, qui est, d’après nos croyances, l’œuvre du diable. Mais d’un grand mal, Dieu peut tirer un plus grand bien si nous mettons notre confiance en Lui. Ainsi, toute offrande, aussi modeste soit-elle, est d’une grande valeur aux yeux de Dieu. Jésus montre l’exemple en offrant Sa Passion et Sa mort pour nous sauver. Dieu souffre avec nous et nous rejoint dans notre pauvreté. Mais s’Il le fait, ce n’est pas pour en rester à ce constat déprimant. Jésus offre Sa mort pour communier à nos souffrances, puis Il ressuscite pour que nous ayons la Vie en plénitude. 😊 Dieu nous aime. Il ne fait pas de différence entre les riches et les pauvres. Aux yeux du Seigneur, la modeste offrande d’une personne en situation de précarité vaut autant, sinon plus, que les millions versés par un footballeur professionnel à une association humanitaire. Jésus Lui-même nous le dit très clairement :
« Jésus s’était assis dans le Temple en face de la salle du trésor, et regardait comment la foule y mettait de l’argent. Beaucoup de riches y mettaient de grosses sommes. Une pauvre veuve s’avança et mit deux petites pièces de monnaie. Jésus appela ses disciples et leur déclara : ˝Amen, je vous le dis : cette pauvre veuve a mis dans le Trésor plus que tous les autres. Car tous, ils ont pris sur leur superflu, mais elle, elle a pris sur son indigence : elle a mis tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait pour vivre.˝ » (Mc 12, 41-44)
En somme, pourquoi faire l’éloge de la pauvreté ? Cette dernière reste un mal à combattre. Quand elle nous tombe dessus, ne nous laissons pas abattre ! Battons-nous pour nous en sortir tout en voyant les aspects positifs qui peuvent se dégager de cette situation dramatique ! 😊
Jean O’Creisren
[1] Sur ce blog, les citations bibliques sont tirées du site de l’AELF.
Vous aussi, vous vous sentez proche des plus pauvres ?
« Nul ne maîtrise une langue s’il n’en connaît tous les niveaux. » Cette citation de Jean Maire de Dupont, fondateur de la gromologie, nous permet d’introduire une question à la croisée de la didactique et de la linguistique.
En effet, enseigner le langage vulgaire est-il utile aux personnes qui apprennent un idiome ? Est-ce au contraire une insulte à la beauté d’une langue ?
La question est loin d’être tranchée. Elle me rappelle un débat sur le sujet que j’ai eu avec une amie il y a une dizaine d’années. Par quelques anecdotes, je vais apporter quelques éléments de réponse à cette problématique qui est loin d’être tranchée…
Faut-il enseigner les gros mots aux étrangers ? Une question existentielle qui suscite de vifs débats…
Apprendre des gros mots dans une langue étrangère est motivant
Il y a quelques années, j’ai donné des cours de français à de jeunes Palestiniens dans le cadre d’une mission de coopération avec l’association AED. Trois élèves devaient effectuer un montage vidéo sous notre surveillance. Cela mettait un temps fou. Pour les motiver, je leur ai dit : « si vous avez terminé dans deux heures, je vous fais un cours sur les gros mots en français ! »
Bien évidemment, cela a rendu leur travail très efficace. J’ai donc pu leur enseigner quelques insanités dans la langue de Rabelais. Mon collègue a pris une photo – que je n’ai malheureusement jamais pu récupérer – où je montrais dans une attitude très professorale un mot écrit au tableau, que la bienséance m’empêche de reprendre ici.
Les élèves nous ont raconté une anecdote en retour. Un mot très courant dans l’arabe vulgaire du Levant est shermout. Ce vocable signifie « salaud ». Lors d’un voyage de classe à Paris, ces jeunes Palestiniens ont enseigné ce terme à leur correspondant. Ce dernier répétait donc « shermout, shermout, shermout ! » lors de cette première soirée d’accueil. La mère de cet hôte parisien a donc demandé à son fils : « mais que veut dire ce mot arabe ? » Et le jeune homme de répondre : « Ça signifie « bienvenue » ! » Le lendemain, nos amis palestiniens sont partis visiter la ville-lumière. De retour chez leur correspondant, ils se sont fait accueillir avec un franc sourire par la mère de ce dernier, qui leur dit « Shermout ! »
On retient facilement les gros mots
Eh oui : si vous apprenez une langue, vous retiendrez facilement ce qui n’est pas à sortir devant n’importe qui… pour le meilleur et pour le pire !
Il y a une bonne dizaine d’années, j’étais en colocation avec un ami chinois, que nous appellerons Wei. Il apprenait le français dans l’optique d’étudier en France une fois le niveau B2 validé. Il n’était pas excellent en langues, mais ses bonnes compétences interpersonnelles lui permettaient de bien progresser au contact des natifs. Il avait beaucoup d’humour et s’amusait à sortir à n’importe qui les bêtises que nous lui apprenions.
Par exemple, lorsqu’il est allé louer un vélo de la ville, la fonctionnaire municipale, âgée d’une quarantaine d’années, lui a demandé s’il se plaisait en France. Il a donc répondu : « Oui, ça roule ma poule ! »
Invité chez moi pour fêter Noël, il était ravi de commenter l’évier qui fuyait : « c’est la flotte ! ». Quand nous sommes partis dans la voiture pour aller à la messe, il a commenté : « on va dans la bagnole ! » Et en ressentant le climat hivernal, il s’est exclamé à la sortie de la célébration : « ça caille ! »
Je vous laisse imaginer tout cela avec l’accent mandarin…
Lors d’un repas dans une famille très chic, la maîtresse de maison a proposé à Wei de se resservir. Il a répondu avec enthousiasme : « Ah oui, je kiffe, c’est exquis ! »
Nos autres colocataires me reprochaient d’apprendre à Wei uniquement le langage familier et vulgaire. J’ai donc essayé de lui enseigner le niveau de langue soutenu.
Avec Wei et un autre ami, nous avons fait un footing un jeudi matin par -10°C. C’est à cette occasion que je lui ai appris l’expression « ça caille ! » Mais je lui ai également appris le verbe « surplomber » lorsque nous pouvions admirer le lac depuis une butte surélevée. Je lui ai aussi demandé de retenir l’adjectif « pittoresque » lorsque nous admirions une belle vue sur un paysage rocheux. Eh bien, sur les trois, il n’a retenu que « ça caille ! »
Cela prouve que l’on retient mieux les gros mots que les autres termes.
Et j’ai pu en faire l’expérience, moi aussi. En tant que linguiste passionné, vous imaginez bien que j’ai profité de cette année de colocation pour apprendre quelques mots de mandarin. Et bien évidemment, je n’ai pas appris que des vocables châtiés…
Wei a poursuivi ses études dans une autre ville et j’ai également suivi mon chemin là où la Providence m’a mené. Mais nous avons toujours gardé contact. Un jour, je suis allé le voir dans le pays étranger où il réside maintenant. Nous nous sommes retrouvés le premier soir dans un restaurant chinois, en compagnie de celle qui est aujourd’hui son épouse. Comme il n’y avait pas de table disponible pour nous au début, nous avons patienté au comptoir à déguster des chips de crevettes. Nous étions juste à côté de la cuisine. Comme dans beaucoup de restaurants chinois, le personnel était d’origine chinoise. J’ai alors répété à l’amie de Wei tout ce que ce dernier m’avait appris. Mon ancien colocataire m’a supplié de parler moins fort, car de tout ce que je disais, seuls les gros mots étaient prononcés correctement et le personnel en cuisine comprenait parfaitement les grossièretés que je criais à tue-tête.
Wei retenait mieux les gros mots français que le langage soutenu. Je prononçais mieux les insanités que les autres termes de mandarin… Il est évident que notre cerveau apprend mieux le niveau de langue familier. Cela n’est pas toujours une bonne chose, car le contexte ne nous permet pas toujours de briller par notre science…
Est-ce une insulte à l’élégance de la langue française ?
Faut-il enseigner les gros mots aux étrangers ? Comme je l’écrivais au début de cet article, une controverse à ce sujet m’opposait à une bonne amie, lorsque nous étions étudiants. Elle me soutenait que les étrangers apprennent le français pour l’élégance de notre belle langue. Par conséquent, il ne fallait pas dénaturer ce prestige, de son point de vue.
Mais n’oublions pas que la vulgarité fait également partie de notre idiome. Rabelais est sans conteste l’un de ses pères fondateurs. Néanmoins, sa plume est assez fleurie…
La richesse du français s’applique aussi aux 6000 à 7000 langues qui font la diversité de notre humanité. Il y a quelques années, j’ai eu la chance de travailler au sein d’une entreprise dont les ressources humaines étaient très internationales. L’un de mes collègues guinéens nous y a appris quelques merveilles de sa langue natale. Mais quand on ne sait dire que « bunnaru », « kanaro », « foytougol » ou « lebol bunna » en fulfulde, ça limite les conversations…
Un autre de mes collègues, d’origine kabyle et d’un tempérament très blagueur, était invité à l’anniversaire de cet ami guinéen. Lorsque celui-ci déclamait son discours, l’Algérien applaudissait avec les autres en criant : « Foytougol ! Foytougol ! Foytougol ! », ce qui signifie « Péter ! Péter ! Péter ! »
Évidemment, les jeunes femmes peules qui entouraient ce farceur étaient très choquées de voir que la poésie de leur langue était réduite à ce verbe trivial…
Dans quelle mesure la vulgarité insulte-t-elle la beauté du français ou de n’importe quel idiome ? Dans quelle mesure honore-t-elle, au contraire, sa richesse ? La question restera éternellement ouverte…
En somme, faut-il enseigner les gros mots aux étrangers ? Chacun est libre de répondre comme il l’entend…
Quant à ce débat avec cette amie, il s’est terminé par la rédaction de mon tout premier exercice de style : « Les jurons distingués ». C’est à partir de là qu’a germé l’idée de mon blog. Si vous le souhaitez, vous pourrez lire cette première production littéraire sur ce lien… 😉
Vous aussi, vous aimez jouer avec les (gros) mots ?
Ça y est, nous sommes déjà en 2022… Alors bonne année à vous ! Afin de nous garantir une bonne santé pendant un an, pourquoi ne pas commencer ce mois de janvier dans la joie et la bonne humeur ? 😊
En effet, rire, c’est important ! C’est bénéfique pour la santé, tant physique que mentale. Je connais une personne qui frôlait le burn-out et qui a réussi à s’en sortir avec une semaine de repos, du café et une séance de fou rire. Dans mon article « 7 astuces pour lutter contre la dépression », je préconise ce remède joyeux. De même, il paraît aussi que certains guérissent de maladies incurables grâce à une bonne dose de rigolade. 😉
Rire bénéficie à votre santé et ainsi qu’à celle de votre entourage
Sur mon blog, je vous propose quelques articles humoristiques :
Si vous n’avez pas la tête à lire, vous pouvez aussi vous fendre la poire avec des vidéos d’humoristes. Personnellement, je suis assez fan de caméras cachées, notamment celles de Rémi Gaillard. Bon, il ne fait pas toujours dans la finesse, mais les vidéos suivantes sont assez passe-partout :
Dans un autre style, Rowan Atkinson est un grand maître du rire, avec son fameux personnage de Mr Bean. Pour ceux d’entre vous qui parlent allemand, je pense que vous rigolerez bien en regardant cette vidéo. Nathanaël Rochat complète l’humour relatif à cette langue germanique dans cette chronique.
Parmi les films que je trouve très drôles, Tais-toi, de Francis Veber, est disponible en libre accès sur YouTube. Jean Reno et Gérard Depardieu forment un duo incomparable de gangsters hors normes. Même si l’image est de mauvaise qualité pour des raisons commerciales évidentes, vous pourrez bien vous marrer en visionnant ce long-métrage sur ce lien.
Eh oui : rire, c’est important ! Il est aussi prouvé scientifiquement que la prière (quand elle s’adresse à un Dieu aimant et protecteur) est un moyen efficace pour améliorer sa santé physique et mentale. Plus d’informations sur ce lien.
Avez-vous déjà parcouru le chemin de Compostelle ? Si oui, vous avez certainement plein d’anecdotes à raconter… Si non, qu’attendez-vous pour vous lancer dans cette aventure ?
Entre autres trouvailles, je vous partage quelques traductions étranges que j’ai photographiées chemin faisant…
« Bienvenidos » et non « Bienvenida »… Voilà ce qu’on appelle une traduction littérale complètement ratée !Quand je voyage en voiture, je fais des pauses toutes les deux heures sur des secteurs d’autoroute. Pas vous ?Bon, il ne s’agit pas d’une traduction, mais d’une pierre que j’ai trouvée sur le chemin. Je l’ai prise en photo car elle ressemble étrangement à la carte de la Péninsule ibérique. Vous ne trouvez pas ?On comprend, mais on voit bien que cette traduction n’est pas l’œuvre d’un locuteur natif…Traduction très orale…On commence la série des perles de la machine à laver de Burgos…Je n’ai jamais pensé à laver mes vêtements avec des coings… Et vous ?Bon, cela aurait pu être rédigé par un Français qui ne maîtrise pas correctement les accords du participe passé… c’est à dire sans doute la majorité de nos compatriotes.Bon, ce n’est pas une traduction, mais cette auto-dérision d’un Breton têtu m’a bien fait rire…« Chemin alternatif » aurait bien fait l’affaire ! Parfois, la traduction littérale est le meilleur choix…Les pictogrammes sont une autre forme de traduction… Vive la sémiotique !En voilà une manière de s’exprimer !Private joke pour les arabophones… Cette traduction est-elle vraiment inmejorable ?Une fois arrivée à Saint-Jacques-de-Compostelle, je suis tombé sur cette autre traduction vraiment pas terrible…
Et voilà pour la série des traductions bizarres ! Si ça veut vous donner envie de vous lancer dans l’aventure du chemin de Compostelle, n’hésitez pas à relever ce défi ouvert aux personnes de toutes convictions politiques et religieuses !
¡Buen Camino a tod@s!
Ultreïa !
Jean O’Creisren
Vous aussi, vous vous intéressez au chemin de Compostelle ?